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La numismatique, une discipline plus que jamais moderne

Saviez-vous que la numismatique faisait partie de ces disciplines rares qui font la spécificité de l’École Pratique des Hautes Études - PSL ? En quoi donc consiste l’étude des monnaies ?

Décryptage autour d’une formation emblématique de l’EPHE - PSL, ouverte aussi bien aux étudiants en master qu’aux chercheurs et autres praticiens de l’archéologie.

 

Étudier des monnaies anciennes ou contemporaines, des espèces monétaires, des médailles, des jetons et autres oboles : on appelle ce champ d’études la numismatique, longtemps cantonnée à un statut de science auxiliaire de l’histoire. Alors qu’il est difficile pour les étudiants et chercheurs de trouver des formations de numismatique dans la majorité des établissements universitaires, l’École Pratique des Hautes Études - PSL en a fait une de ses disciplines « phares », au sein de la section des sciences historiques et philologiques.

 

« Il existe peu de collègues spécialistes car la spécialité en numismatique n’est revendiquée par personne, confie Antony Hostein, directeur d'études à l’EPHE - PSL en charge de la conférence "Histoire monétaire du monde romain". Les historiens considèrent qu’il n’y a pas assez de texte sur une pièce. Les archéologues disent que ce n’est pas un objet purement archéologique, les historiens de l’art pensent que les images monétaires ne sont pas assez riches. Et pourtant c’est une discipline à la croisée de nombreux champs de recherche et qui a profondément changé, ce d’autant qu’il existe des besoins réels. Et à l’EPHE - PSL, grâce aux enseignements dispensés, nous sommes plusieurs à assurer une très bonne couverture chronologique. Ce qui est unique dans le paysage universitaire européen. »

 

 

« Le fait d’hériter d’une tradition ancienne et d’être inséré dans l’environnement PSL nous permet d’attirer de nombreux étudiants »

À ses côtés, Frédérique Duyrat a en charge l’histoire monétaire du monde grec, Marc Bompaire couvre la numismatique et l’économie monétaire de l'Occident médiéval et moderne, tandis que Sylvia Nieto-Pelletier assure une charge de conférences sur l’histoire monétaire de l’Europe celtique. De quoi accueillir une diversité d’étudiants dès le master, de doctorants et post-doctorants. Mais aussi des conservateurs de musée, des archéologues dans le cadre de leur activité, ou encore des retraités passionnés.

 

« Nous sommes une structure particulière dans l’enseignement supérieur et c’est ce qui fait notre force, poursuit Antony Hostein. Le fait d’hériter d’une tradition ancienne et d’être inséré dans l’environnement PSL nous permet d’attirer de nombreux étudiants au niveau master et au-delà. On intervient par ailleurs dans d’autres universités, dans des musées, parfois dans des institutions de conservation ou de recherche en archéologie. Des collègues d’autres institutions académiques viennent se former chez nous. Des étudiants du Maghreb, d’Égypte et de nombreux pays européens suivent également nos cours à Paris ou à distance. »

 

Leur objectif ? Acquérir rapidement des rudiments afin d’intégrer davantage la documentation numismatique dans leurs travaux ou d’interpréter des mentions de valeurs monétaires. Essentielle à notre connaissance du passé, aussi bien en histoire qu’en archéologie, la numismatique est en effet une discipline qui se prête à de multiples approches de l’histoire – politiques, économiques ou culturelles.

 

En contact direct avec l’objet, du séminaire à la Sorbonne en passant par la BnF ou le musée Carnavalet

Afin d’enrichir son corpus ou son catalogue, qui est pour le numismate la forme normale de publication du matériel, le contact direct avec l’objet monétaire est indispensable. Pour ce faire, les étudiants alternent formations théoriques et pratiques. Le volet théorique a lieu à la Sorbonne ou à l’Institut National d’Histoire de l’Art, avec des séquences notamment centrées sur l’identification des pièces, les légendes et images monétaires, ou encore sur la monnaie en contexte archéologique. Le volet pratique permet quant à lui de s’immerger dans les collections exceptionnelles du cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale de France (site Richelieu) et du musée Carnavalet pour ne citer que ces deux exemples, afin de procéder à un examen individuel des monnaies dans les plateaux.

 

Deux heures de conférences et une heure d’initiation sont ainsi proposées à un rythme hebdomadaire pour chaque période, de la mi-octobre à début juin. Une formation intensive de trois jours a également lieu en tout début d’année universitaire afin d’accueillir des étudiants désireux d’être rapidement opérationnels.

 

« C’est une question d’équilibre, observe Antony Hostein. Depuis que nous nous sommes convertis aux humanités numériques, on peut facilement accéder à de nombreux objets en ligne et entrer ainsi dans la documentation numismatique. Quand on étudie par exemple l’histoire monétaire du monde romain, on étudie toute l’histoire de Rome à travers la monnaie, celle de ses relations avec la Gaule, de l’Orient romain, etc. Chaque pièce ou série analysée sous différents angles d’approche (archéologique, iconographique, archéométrique, etc.) permet d’enrichir considérablement notre approche de l’histoire, surtout quand les sources textuelles font défaut. Avec l’émergence des humanités numériques, des analyses des métaux ou des contextes archéologiques, nous autres numismates sommes vraiment dans une approche transdisciplinaire. »

 

Une approche qui fait de la numismatique une discipline résolument moderne. Une source primaire en prise avec des problématiques contemporaines dont les éclairages sur la compréhension de nos sociétés ne sont pas à mésestimer, à l’instar des questions autour du pillage et du patrimoine.